I'd like to report a missing person + Mayna&Dex

Sam 5 Aoû - 20:40

Quand on a pas de boulot, on perd vite la notion du temps. Les journées et les soirées se mélangent jusqu'à ne plus vouloir rien dire, on se perd, on arrête d'essayer de faire quelque chose de sa vie, parce que de toute manière, personne n'est assez intelligent pour nous engager. Puis peu à peu on s'enferme dans une certaine dépression, incapable de faire quoique ce soit parce que personne n'a réussi à mettre aucune confiance en nous. Enfin ... Dans la plupart des cas, ça se déroule ainsi. Dexter, lui, il a toujours été bien conscient que personne ne croyait en lui, que tous ceux qu'il avait jamais croisé voyaient en lui le gamin perdu qu'il avait toujours été. Mais la grande nouvelle, c'était qu'il en avait jamais rien eu à foutre. Il avait toujours vécu pour lui, et le regard des autres l'indifféraient au point qu'il riait presque devant ceux qui l'enfonçaient. Mauvaise habitude. Alors ce matin là, comme tous les matins depuis des années, il s'était levé aux aurores, avait attrapé son sac où il rangeait absolument tous ses biens - qui consistaient en quelques vêtements et trois barres de céréales - après avoir pris sa douche, avait jeté un dernier regard au matelas sur lequel il dormait, et était sorti. Il ne restait pas souvent dans des endroits comme celui-ci, là ça avait été le grand luxe. Un appartement abandonné dans un bâtiment qui tombait en lambeaux et personne n'avait encore eu la présence d'esprit d'y couper l'eau. Mais il ne pouvait pas rester, nulle part. Tous les jours la même bataille, quand il ne créchait pas chez une connaissance, se trouver un nouvel endroit où les flics ne le trouveraient pas. Parce que les gamins SDF, ils aimaient pas bien ça.

Arrivé dans le centre ville, Dexter sortit ses affiches et son vieux rouleau de scotch. Grimaçant,
il se dit qu'il devrait sans doute bientôt s'en procurer un autre, il l'usait comme neige fond au soleil. Après tout, il n'avait rien d'autre à faire. Comme tous les jours, il se perdit deux minutes à contempler le visage de Naïa, souriante. Cette photo n'avait plus de sens depuis longtemps pour lui. Peut-être parce qu'il ne l'avait pas vue depuis des années, l'imaginer sourire était désormais hors de sa portée. Avec un soupir, il se mit au travail. Tous les jours il venait ici, tous les jours, sur les mêmes poteaux, les mêmes murs, les mêmes panneaux dans l'espoir que quelqu'un ait aperçu la jeune femme quelque part. Toutes les nuits, les agents de nettoyage de la ville les enlevait. Ce sketch durait depuis un temps incroyable, et personne ne songeait à l'arrêter.

Après quelques heures à errer dans la ville, se faire rembarrer dans les boutiques qui ne voulaient pas entendre parler d'une fille disparue depuis plus de cinq ans, il entra dans le Spirit'D Bar. S'il avait eu du fric, ce serait sans doute un endroit où il passerait son temps. De l'alcool et un endroit où s'asseoir loin du bruit de la rue, c'était tout ce qu'il lui fallait. Cherchant dans ses poches le peu de monnaie qu'il lui restait de son dernier "job" - qui consistait seulement à faire la manche au coin d'une rue - ses affiches dans une main et l'autre enfoncée dans sa poche, désespérément, il se mit à pester. Il commençait à avoir l'habitude. S'il voulait demander à ce qu'on affiche la recherche de Naïa, il fallait au moins qu'il se présente comme client. Pour le moment, c'était plutôt mal parti.

Sam 5 Aoû - 21:19

I'd like to report a missing person
Dex et Myana Les jours s'empilaient au même rythme que les verres d'alcool qu'ingerait Myana. Ses nuits étaient longues et agitées et elle n'avait aucune autre compagnie que cette bouteille qui jonchait le sol de son appartement, à côté de son lit, comme une vieilleuse qui l'empêchait de faire des cauchemars. D'ailleurs, parfois, elle avait peur de s'endormir. Peur de revivre encore et encore la disparition de sa meilleure amie. Peur de culpabiliser, de se détester à en crever. Parce que, depuis ses dix-sept ans, c'était ça son quotidien. Pourtant, elle avait essayé d'aller mieux, de passer à autre chose parce que la vie continue comme on dit. Mais non, sa vie à elle ne voulait faire abstraction de ses actes. Une part de sa personne vivait toujours dans le passé et elle espérait un jour, pouvoir sourire en pensant à Naia, au lieu de pleurer à en épuiser ses glandes lacrymales.

Elle aidait tous les jours des jeunes personnes paumées, à deux doigts de se faire éjecter dans la rue, droguées pour la plupart, et cela n'aidait toujours pas sa conscience à la convaincre qu'elle avait une belle âme. La blonde était toujours aussi persuadée d'être une mauvaise personne, et une horrible amie. Sa vie promettait d'être longue.

En se levant après une énième nuit d'insomnies, elle tenta de cacher ses faiblesses derrière du maquillage, un artifice qui donnait le change en société et lui permettait de devenir une personne normale à part entière. Enfin, c'était simplement une carapace. Mais ça marchait, parce que les gens se fichaient de savoir qu'elle était malheureuse et c'était mieux comme ça.

Après le travail, elle avait du mal à retrouver sa solitude, qui se présentait comme un double diabolique qui l'a suivait partout. Elle essayait de s'en dépêtrer en sortant dans un bar. C'était ironique quand on y pensait puisque rien ne changeait dans ses habitudes si ce n'était qu'elle était entourée de monde. Mais elle se sentait seule quand même, d'ailleurs, c'était sûrement pire. Mais bon, elle avait l'impression de sortir, de faire des efforts, c'était le principal.

Elle se plaça dans un coin du bar, à sa table habituelle. Elle commanda un verre, puis deux et le troisième lui fut offert par le barman. Ça servait toujours d'avoir un joli sourire, même quand il n'était pas sincère. Puis quelqu'un l'a sortit de ses pensées. Un jeune homme à côté d'elle s'agitait en fouillant dans ses poches de quoi payer sa consommation. Si elle n'avait pas fait attention à ce qu'il tenait dans son autre main, elle se serait sûrement de nouveau faufilée dans son cerveau. Sauf que la, ce n'était pas possible. Cette tête qu'il y avait sur son affiche, c'était sa meilleure amie. Du moins c'était son portrait. Son cœur loupa un battement. C'est quoi ce bordel ? Se disait-elle. Il fallait qu'elle sache.

Elle lui tendit de la monnaie généreusement, ne lui laissant pas le choix, et avec un sourire discret, ajouta :

- Tiens, comme ça t'arrêteras de gesticuler dans tous les sens. Ça te donnera une bonne raison de me payer un coup la prochaine fois.

Les yeux rivés sur l'affiche, pleins de questions se bousculaient dans sa tête. Mais qu'une seule n'allait en sortir :

- Tu la connais ? Demanda-t-elle en essayant de prendre un air détaché.

© CRIMSON DAY